En bon trentenaire actif et sportif, le hérisson bleu le plus connu du monde jette aujourd’hui un regard attendri en arrière sur sa longue et prolifique carrière et se souvient des jours heureux de sa jeunesse tumultueuse. Après avoir tenté de renouveler sa formule l’année dernière avec l’épisode Frontiers, Sonic revient aujourd’hui, accompagné de tous ses amis, dans une aventure placée sous le signe du retour aux sources. Ce dernier opus du jeu de plateforme est ainsi développé par Arzest, le studio créé par le co-créateur du hérisson, Naoto Ōshima, dont c’est le grand retour en tant que character designer. Il revient aux commandes avec la genèse du mystérieux personnage de Trip, sa précédente contribution à la franchise remontant à la version Adventure, sortie en 1998 sur Dreamcast. Rejoignant Eggman (le Docteur Robotnik) et Fang The Hunter, apparu dans Sonic the Hedgehog : Triple Trouble, au sein du camp des antagonistes, cette bestiole casquée est bien évidemment l’une des attractions principales qui rejoint ce casting de superstars. L’équipe de Arzest a bien entendu été épaulée par la branche japonaise de la Sonic Team pour le développement, notamment au niveau du design.
Go ahead and jump ! (jump)
L’introduction très dynamique en dessin animé est particulièrement sympathique et nous présente l’ensemble de l’équipe jouable, à grands renforts de plans dynamiques qui s’enchaînent à toute vitesse. Il manque juste un thème musical fort pour que le tableau soit parfait, comme avait pu l’être le thème d’ouverture de Sonic CD, qui aujourd’hui encore titille la fibre nostalgique des possesseurs de Mega-CD de l’époque.
Cinq espaces de sauvegarde sont disponibles, ce qui permet à chaque membre de la famille de commencer sa propre partie et d’avancer à son rythme. Sonic Superstars respire la simplicité jusque dans ses options de jeu, en ne proposant de régler que la langue utilisée pour les menus, la sensibilité de la manette et le niveau de volume des sons et de la musique.
Bridge Island, le premier monde abordé, a bien entendu des petits airs de Green Hill Zone, tant par son design que par les premières sensations manette en main. Le gameplay de Sonic et de ses amis procure les mêmes montées d’adrénaline que lors des premiers épisodes des années 90, la lourdeur en démarrage arrêté comprise. Mais une fois lancé, la sensation de vitesse particulièrement grisante est immédiate.
Nos quatre héros ont néanmoins des capacités personnelles : Sonic peut lancer une ruée à l’atterrissage, Tails vole à l’aide de ses queues, Knuckles casse certains obstacles et grimpe aux murs et enfin Amy bénéficie d’un double saut et d’un coup de marteau extrêmement pratiques. La bestiole choisie, quelle que soit sa couleur, virevolte dans tous les sens, enchaînant les rebonds improbables et les folles accélérations dans les pentes, tunnels et autres loopings qui parsèment judicieusement chaque niveau, tout en accumulant bien entendu les précieux anneaux.
Mais les meilleures choses ont une fin. Si le level design particulièrement étendu offre la possibilité de cheminer sur des parcours différents à chaque partie et encourage clairement les accélérations les plus fantasques, il place également de nombreux ennemis et pièges en travers de notre chemin, le plus souvent pile à l’endroit d’une pirouette hasardeuse ou juste après la réception d’un saut. « De la pratique naît la perfection » dit-on souvent et cet épisode Superstars ne déroge pas à la règle, promettant de nombreux essais à chaque tableau pour réussir à le finir en un temps record, tout en sauvant un maximum d’anneaux.
- Se retrouver gelé, ça fait perdre du temps
Harder, better, faster, stronger ?
Car oui, histoire de rendre le défi un peu plus compliqué, chaque stage et pas seulement le dernier de chaque zone, nous met face à un boss dont il faut se défaire avant de passer au suivant. Il prend parfois la forme d’une séquence de course folle, demandant des sauts milimétrés, ou s’accompagne de grimpette au-dessus d’un vide, cette fois-ci mortel, sous peine de retourner à la Borne Étoile précédente. Fang y tient une place de choix, venant régulièrement nous titiller, toujours monté sur son terrible engin volant.
Chacun de ces affrontements, qui demandent une bonne observation et un certain sens stratégique, est l’assurance de terminer le niveau avec seulement une poignée d’anneaux en poche, du moins les premières fois. Car si les schémas d’attaque de ces ennemis, le plus souvent mécaniques, sont à la longue prévisibles mais toujours variés, leur vitesse d’exécution peut parfois surprendre.
Au fil des onze zones originales principales mais très inspirées des environnements historiques que nous parcourons, la lassitude n’est jamais au rendez-vous, à plus forte raison car elles sont le plus souvent séparées en deux actes seulement. Chacune d’entre elles offre des variations bienvenues dans le gameplay, sans compter certains niveaux spécifiques à un personnage en particulier.
Si elles sont relativement classiques dans leur construction, en demeurant dans l’univers de Sonic, elles restent toujours très efficaces, comme le Pinball Carnival qui invite une fois de plus à vivre l’expérience d’une boule de flipper. Nous avons en revanche un peu moins apprécié les parties sous-marines de Lagoon City et le stress de réussir à trouver une bulle d’air dans le « feu » d’une action ralentie, le syndrôme post-traumatique de la Labyrinth Zone de Sonic premier du nom étant toujours là… plus de trente ans après.
Visuellement, sans être un festival pour les mirettes, Sonic Superstars est très propre, ne souffre d’aucun ralentissement et utilise judicieusement la 2.5D, principalement dans l’introduction des ennemis majeurs et dans la gestion de nombreux éléments de décor. Les personnages et ennemis gagnent en finesse, au regard de leurs designs d’origine, tout en conservant leur dynamisme en course et leurs mythiques gimmicks d’inactivité. Le traitement sonore est au diapason, avec une reprise rigoureuse des bruitages qui ont fait le succès de la licence depuis le début. Les mélodies ont quant à elles cette « Sonic Touch » inimitable de l’époque de la Mega Drive, modernisée bien entendu, mais qui n’aurait pas détonné sur les versions plus anciennes.
- Le hub central regroupe toutes les infos importantes
Le changement de plan et certains effets visuels, impossibles à réaliser correctement avec les machines de l’ère 16-bit, offrent ici une profondeur agréable à l’œil lors des transitions tout en multipliant l’impression d’exploration libre. Plusieurs niveaux présentent des modifications surprenantes mais toujours bien pensées, comme la Cyber Zone qui pixelise notre personnage et le transforme en plusieurs animaux, glissants ou flottants, dans un esprit particulièrement « arcade » cher à SEGA ou encore ce niveau qui reprend les codes de Fantazy Zone, fort sympathique à défaut d’être mémorable. Enfin, en restant dans la thématique, la Egg Fortress, bastion de notre savant fou bedonnant favori, nous fait revivre la progression du niveau littéralement à rebours avant de déboucher sur la confrontation finale, épique à souhait.
Les Émeraudes sont les meilleures amies du hérisson
Depuis le tout premier épisode, elles font bien entendu partie du paysage, les fameuses Émeraudes du Chaos. Au début simples collectibles, puis octroyant ensuite une invincibilité toute « dragonballesque » à notre héros, elles sont aujourd’hui dans cette itération de puissants outils dotés de super-pouvoirs. Pour les récupérer, c’est simple : il faut trouver l’entrée des niveaux spéciaux et les réussir. Si la première partie du plan peut demander de pousser l’exploration ou d’avoir de la chance de tomber par hasard sur un anneau doré dix fois plus grand que les autres, une fois à l’intérieur, c’est une autre paire de manches.
La récupération s’effectue en temps limité. En se balançant comme un Tarzan du futur dans des décors psychédéliques. Bondissant d’anneaux en bonus accélérateurs. Tout en évitant des bombes et les cristaux semi-transparents du décor, afin de rattraper l’Émeraude qui s’enfuit en flottant. Si certains pourraient se poser des questions suite à la lecture de cette description, nous les rassurons (ou pas) : la seule chose vraiment « stupéfiante » ici, c’est le design de cette phase de jeu.
Une fois en notre possession, elles nous permettent d’utiliser un certain nombre de capacités. Si la première, dévoilée lors de l’introduction, a tout d’un hommage à peine déguisé à un certain ninja blond vêtu d’orange, faisant apparaître une multitude de clones du personnage qui foncent devant lui en détruisant tout sur leur passage, d’autres offrent des options plus utilitaires, comme le dévoilement d’objets cachés ou le ralentissement du temps.
Leur utilisation est bien évidemment limitée et se recharge lors d’un passage à une Borne Étoile. Sans vraiment être des « game changers », leur utilisation étant complètement optionnelle, elles permettent de temps en temps de se sortir d’un mauvais pas ou de faire de belles découvertes.
Un plus un plus un, plus toi et moi
Des niveaux analogues, mais signalés par un anneau cette fois-ci bleu clair, proposent les mêmes types de séquences mais pour récupérer des pièces d’or à l’effigie du hérisson. Certaines d’entre elles sont placées directement dans les niveaux ou récupérables en récoltant cent anneaux. Il est aussi possible de créer un portail vers un niveau bonus qui en recèle trois en touchant une Borne Étoile tout en ayant cinquante anneaux en poche. Classique. Une fois à l’intérieur, nous nous retrouvons dans les fameux niveaux tournants hérités du premier Sonic, avec quelques ajouts et subtilités en plus. Si l’expérience peut être douloureusement nostalgique pour les plus anciens, elle est surtout toujours aussi frustrante, les mouvements de notre boule de piquants étant ici très patauds et l’expulsion expéditive jamais très loin.
- La pièce est juste là !
Cette monnaie nous permet, au sein de la boutique du jeu, d’acheter diverses pièces de robots afin de personnaliser les différentes parties de l’avatar virtuel qui nous représente lors de nos affrontements en mode multijoueur. De nouveaux éléments cosmétiques sont déverrouillés au fil de notre progression dans l’histoire. Malheureusement, l’intérêt pour le mode « Combat », jouable jusqu’à huit dont quatre en local est relativement limité. Il consiste en trois épreuves successives de survie, récolte et course avec sept autres participants, joueurs ou bots, contrôlés par la machine.
À la fois anecdotique et beaucoup moins abouti dans son gameplay que d’autres party games plus spécialisés, il peut cependant susciter quelques fous rires et engueulades. L’option « Contre-la-montre », offrant de se mesurer aux plus rapides du monde sur l’ensemble des niveaux, est bien entendu de la partie. À l’heure où nous écrivons ces lignes, les classements ne sont pas encore effectifs.
Parcourir l’aventure principale à plusieurs est, en revanche, beaucoup plus fun et chaotique, même si, à l’usage, le titre perd carrément en difficulté. Les joueurs les moins à l’aise ou les moins vifs sont régulièrement sortis de l’écran mais peuvent réapparaître auprès du plus rapide d’entre eux. Quand ce n’est pas l’inverse qui se passe… Les niveaux bonus se déroulent également en coopération alors que les « spéciaux si spéciaux » alternent le personnage actif entre les différents participants.
En terminant le jeu une première fois, nous débloquons Trip en cinquième personnage jouable ainsi que son scénario associé, elle qui tout au long de l’histoire, a réussi à nous attendrir par sa touchante maladresse et sa timidité. Ses capacités ne sont d’ailleurs pas de trop pour relever le défi, car elle combine les compétences d’Amy et de Knuckles. Ce niveau de difficulté supérieur ainsi qu’une liste de succès encourageant la rejouabilité représentent justement ce qu’il faut pour maintenir l’intérêt du titre qui, reconnaissons-le, peut se visiter une première fois au grand trot en une poignée d’heures.
Testé sur Xbox Series X (Optimisé)