Alors que l’on pensait la saga Project Zero jetée aux oubliettes, il s’avère que Koei Tecmo en a décidé autrement. En effet, pour fêter les 20 ans de la saga, l’éditeur nippon a voulu mettre les petits plats dans les grands en ressortant du placard le dernier né de la fournée PZ, La Prêtresse des Eaux Noires. Initialement exclusif à la Nintendo Wii U, le jeu débarque donc sur PC et toutes les consoles, y compris next-gen, en amenant avec lui quelques améliorations. Est-ce pour autant suffisant pour raviver la flamme des fans ?
- Vous m’avez l’air peu sympathique pour une prêtresse...
Vous souhaiteriez un peu de nostalgie avec ça ?
Né en 2001, Project Zero est le fruit de l’esprit dérangé mais néanmoins fertile de Makoto Shibata. Alors que le survival horror est à son apogée, le studio opte pour un changement drastique dans le style. En effet, alors que les Silent Hill et les Resident Evil surfent sur la profusion d’hémoglobine et les monstres aux profils des plus tordus, Project Zero préfère se tourner vers une ambiance lugubre, un thème morbide à souhait et des fantômes oppressants. Suite au succès critique du premier opus, la saga se dote jusqu’en 2015 de 4 suites qui, malheureusement, ne suscitent pas le même enthousiasme. Project Zero finit par tomber dans l’oubli. Nous sommes donc 20 ans plus tard et Koei Tecmo désire rafraîchir la mémoire des joueurs grâce à un portage du dernier opus, Project Zero : La Prêtresse des Eaux Noires. Si cela peut sembler être une bonne idée aux premiers abords, il faut avouer que les améliorations et modifications apportées ne rendent pas honneur au jeu originel.
Project Zero demeure très particulier dans son approche et c’est justement ce qui le fait sortir du lot. Le scénario du jeu tourne principalement autour du mont Hikami, une montagne connue pour être le lieu de prédilection pour les suicides, mais pas seulement. Outre le passage à l’acte ultime, il semblerait que le mont Hikami soit aussi un lieu où l’on compte un nombre important de morts suspectes et de disparitions étranges, spécialement une fois la nuit tombée. C’est donc au cœur de cette atmosphère pesante que nous incarnons 3 personnages aux histoires bien distinctes mais aux destins entremêlés : Yuri, Miu et Ren. Chacun d’entre eux est connecté au mont Hikami pour des raisons diverses et c’est à nous de découvrir le fil conducteur entre ces 3 intrigues.
À l’inverse d’un Resident Evil ou d’un Forbidden Siren où nous dégommons du zombie à l’aide d’armes à feu diverses et variées, dans Project Zero, nous faisons face à des esprits assez menaçants et la seule arme dont nous disposons ne contient pas de munitions mais des films. En effet, notre seul moyen de défense prend la forme d’un appareil photo, on ne parle pas d’un simple Kodak ici, mais d’un appareil photo capable de “blesser” les fantômes à chaque cliché.
Pour infliger des dégâts, il faut tout simplement cadrer correctement les ennemis avec l’appareil photo portant le doux nom de Camera Obscura. Nous avons la possibilité de choisir les films et les objectifs de l’appareil photo, ceux-ci octroyant des avantages et capacités différentes. Lorsque l’esprit nous attaque, nous devons sortir notre Obscura, un rectangle apparaît alors, indiquant l’angle de prise de vue. Le principe reste simple (sur le papier) : chaque cliché bien placé blesse l’ennemi et génère des fragments. En répétant l’expérience un certain nombre de fois, nous obtenons assez de fragments pour débloquer 5 petites orbes en bas de l’appareil qui nous permettent d’effectuer un “cliché fatal” afin de détruire définitivement l’esprit enragé et cumuler des points. Ces derniers serviront au début du chapitre suivant à acheter du stuff puisque le jeu se base sur un système de ranking plutôt généreux.
Posez cette table de Ouija, il n’y a pas besoin !
Nous allons maintenant profiter de l’aspect gameplay pour comparer la version originale et cette cuvée 2021. Le viseur à l’écran remplace alors le deuxième écran du gamepad de la Wii U. Ce qui aurait pu être une très bonne adaptation devient malheureusement une corvée car switcher entre la Camera Obscura et le déplacement de notre personnage est un véritable calvaire. Au fil des chapitres, les fantômes deviennent de plus en plus coriaces et certains ont même l’audace de courir dans tous les sens ou bien de se téléporter pour nous attaquer sans crier gare. Seulement voilà, déplacer la caméra prend approximativement 2 heures et notre personnage est naturellement d’une lenteur phénoménale. Du coup, être réactif et rapide demande une patience et une dextérité de tous les diables, ce qui n’aide pas du tout à s’imprégner de l’ambiance.
Il faut quand même se demander si la lenteur n’est pas le fer de lance du titre car tout, absolument tout, est d’une mollesse sans précédent : les chargements tout d’abord, mais aussi et surtout les dialogues en plus des fameux déplacements. Rajoutons à cela des baisses de framerate et nous obtenons le quinté gagnant de l’ennui en pleine action. Les personnages en sont également bien représentatifs puisque leurs expressions sont, au mieux, fades au possible et au pire, inexistantes. Si la durée de vie d’environ une grosse dizaine d’heures est fortement appréciable pour un jeu lambda, Project Zero n’arrive pas à convaincre de par sa lenteur et son manque d’ergonomie.
Tout ceci est fort dommage car graphiquement, La Prêtresse des Eaux Noires s’est fait un sérieux lifting : des couleurs plus vives, des contrastes plus travaillés et des textures plus nettes. On est encore loin d’une version digne de ce nom pour des consoles de nouvelle génération mais on remarque réellement les efforts du studio pour rendre son titre plus séduisant. L’ambiance sonore n’est pas en reste non plus puisque le sound design est plus qu’efficace avec les murmures gutturaux des esprits, le froissement des feuillages dans les bois et les bruits suspects perçus au détour d’un couloir. Si la plupart des passages d’effroi ne sont pas forcément une réussite, quelques rares jumpscares font leur effet mais ce n’est pas suffisant pour maintenir le joueur en haleine et surtout le garder dans l’ambiance glauque voulue par le jeu. Sans parler de la profusion de textes beaucoup trop longs pour qu’on s’y intéresse vraiment. Les améliorations sont soit trop légères, soit mal amenées pour être prises au sérieux pour un portage aussi important. C’est fort regrettable car le thème et l’histoire principale de Project Zero étaient bien partis pour captiver le joueur par leur originalité et profondeur. Pour les réelles nouveautés, on ne trouve finalement qu’un mode photo loin d’être transcendant ainsi que des costumes n’apportant rien d’extraordinaire non plus.
Testé sur Xbox One