S’il y a une licence que je chéris depuis tout petit c’est bien MX vs. ATV, et si la presse vidéoludique n’a jamais vraiment été en mesure de mettre en avant les jeux ou de saisir les qualités d’une discipline de niche, les fans, eux, ont connu avec Unleashed et Extreme limite de nombreuses heures de courses endiablées. Est ensuite arrivé le monstre Reflex, (re)définissant les bases du genre avec un pilotage à deux joysticks et surtout une déformation des pistes en temps réel, véritable pépite pour toute une génération de joueurs dans une période ou les jeux de motocross ne courraient pas (plus) les rues. Les choses sont désormais différentes, Milestone est venu mettre son grain de sel et propose désormais avec Monster Energy Supercross et la série MXGP des jeux basés sur les licences officielles plongeant le joueur au centre des courses “comme à la télé”. Le nouveau bébé de Rainbow Studio baptisé “MX vs. ATV All Out” a donc fort à faire pour reconquérir le cœur des joueurs après des épisodes Alive et Supercross décevants, mais la recette qui fonctionnait à l’époque est-elle toujours bonne aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr.
Faux Départ
C’est un peu fébrile que l’on insère la galette, pressé de voir ce que le jeu a à offrir, mais aussi craintif d’une nouvelle déception. Selon ses pères, dans All Out, tout est “nouveau”. De quoi émoustiller le fan qui sommeille en moi, déçu de l’orientation prise par les 2 derniers épisodes. Malheureusement, on ne peut pas dire que les premières heures soient des plus convaincantes, après avoir téléchargé les 25 Go de patch day one (oui, la partie CD ne représentant que quelques Mo) on se retrouve sur l’une des 5 maps free ride constituant notre hub personnel. Chacune d’elles comprend de vastes étendues au relief marqué avec également une piste de supercross, de motocross et des rampes de freestyle. C’est l’occasion de tout de suite remarquer deux choses : la première c’est que le jeu n’est pas une claque graphique, les textures au sol sont très moyennes, l’environnement est fade et la végétation peine à convaincre. En fait, si d’habitude l’utilisation de l’Unreal Engine 4 donne un vent frais aux productions qui l’emploient (coucou Milestone), ici ce n’est vraiment pas le cas. La deuxième c’est que le jeu rame comme pas possible… Jamais le framerate pourtant à 30 images par seconde n’arrive à tenir la cadence, et si on pouvait penser que cela sera différent sur les pistes “fermées”, il n’en est rien, c’est même pire…
En course, avec les 11 I.A. derrière la grille, certains circuits sont carrément injouables et c’est inadmissible, plus encore quand sur la jaquette on voit marqué “Optimisé pour Xbox One X”. Le jeu n’est vraiment pas à la hauteur et ressemble plus à un titre de fin de génération précédente qu’à une production de 2018. Si on en croit les informations qui nous sont données, il est censé tourner en 4K, mais à l’image ce n’est vraiment pas l’impression qu’on a ; l’aliasing est bien présent et le HDR peine à faire ressortir des effets de lumière timides. Les motos et les pilotes ne jouissent pas non plus d’un soin particulier, on est bien loin de ce qui a déjà été fait sur la licence dans le passé. La partie sonore est logée à la même enseigne avec des bruits de moteurs vraiment ratés (alors que la licence excelle généralement dans le domaine), si les 4 temps ressemblent plus à des tracteurs qu’à des machines de compétition au rupteur, les 2 temps, eux, font le bruit d’une tondeuse un peu trop pleine… Il ne reste que la BO pour relever un peu le niveau avec des groupes comme The Offspring qui collent bien à l’ambiance bien que vu et revu.
Lorsqu’on en a assez de rouler dans le hub, une simple pression sur “start” ouvre le menu : on retrouve sans surprises les classiques contre-la-montre (avec cependant cette fois-ci l’ajout de notre fantôme pour les chasseurs de chronos), course rapide et les modes multijoueurs en ligne (jusqu’à 16 joueurs !) et local en écran partagé à 2 joueurs. Vient ensuite le pseudo mode carrière baptisé “series” qui, comme dans MX vs. ATV Supercross ne consiste qu’en une succession d’épreuves sans saveur. Pas de mise en scène, très peu d’enjeu à part un gain d’argent pour acheter de l’équipement, pas question non plus de sponsors, équipes ou autres et c’est bien dommage. Après un Monster Energy Supercross qui nous immerge dans le championnat SX US avec le vrai speaker, le format de course officiel ou les sponsors, ce “MVA” fait pâle figure à coté. Sans compter qu’il faut bien évidemment terminer les championnats Quad et UTV sur des pistes en plein air peu inspirées avant de pouvoir espérer s’essayer au supercross. Il faut en revanche souligner que les modes en ligne fonctionnent plutôt bien, fait assez étonnant quand on se rappelle le calvaire ne serait-ce que pour se rejoindre dans les opus précédents.
#FreeTheWhips
Si la technique n’est pas le fort du jeu, on peut néanmoins espérer que le gameplay soit au rendez-vous ; malheureusement là encore, les choses ne sont pas aussi simples. MX vs. ATV est connu surtout comme un jeu de motocross, arcade certes, mais avec un degré de réalisme tout de même respecté, une courbe de progression vaste et surtout la possibilité pour les fans d’avoir dans les sauts une totale “liberté” de mouvement. Une chose que l’on reproche encore aujourd’hui à ses concurrents de chez Milestone. Dans All Out, on retrouve donc ce qui a fait le succès de l’épisode Reflex, petite révolution en son temps, avec le pilotage à deux joysticks (le gauche pour la moto, le droit pour le pilote) et également cet aspect “fluide” des épisodes Unleashed. Et si on pouvait se dire que c’est une bonne chose tant ces deux jeux restent des références aujourd’hui dans le coeur des fans, on se rend vite compte qu’il y a quelque chose qui cloche. Premièrement, le jeu est beaucoup trop rapide, on fonce à travers tout en ne freinant que très (trop) rarement et surtout en se fichant totalement des trajectoires que l’on prend. La moto accroche trop, les freins ne servent à rien, et on retrouve toujours cet effet abusé de “boost” lorsqu’on se sert de l’embrayage.
Vient ensuite la fameuse question des sauts et particulièrement des whips et des scrubs. De ce côté-là, on retrouve l’aspect flottant en l’air des épisodes Unleashed ; en revanche, la moto semble ne peser que quelques grammes. On peut la “tordre” dans tous les sens sans problème de façon là aussi très irréaliste. Un peu à la manière des MX 2002/Superfly sortis sur PS2 et Xbox, où tant qu’on laissait le stick dans une direction, la moto faisait des tours sur elle-même… Un aspect qui va vraiment à l’encontre de la série qui s’efforçait de garder une physique en l’air réaliste où il fallait par exemple gérer les gaz pour remettre la moto dans l’axe de la piste. Alors oui on s’amuse un peu à balancer quelques whips, mais cela est bien trop simple. Le constat est le même pour les scrubs (amortis de sauts pour réduire la hauteur et ainsi gagner du temps) : si avant il était jouissif de lancer de gros amortis et de se battre pour ramener la moto, l’effet est désormais aseptisé au possible et on perd toute la subtilité qu’avait réussi à amener la série à ce niveau notamment dans l’épisode Reflex. Globalement, les fans n’y trouveront surement pas leur compte, le jeu est permissif au possible et on ne tombe presque jamais. C’est d’autant plus dommage que la déformation des pistes, elle, fait plutôt bien le job, obligeant souvent en fin de course à changer nos traces pour avoir une piste propre.
On passera rapidement sur le pilotage du quad qui manque lui aussi de crédibilité et accroche beaucoup trop la piste pour permettre de s’amuser (mention spéciale pour le pilote qui se penche dans le sens inverse dans les virages…) et encore plus rapidement sur celui de l’UTV (sorte de petit buggy deux places) qui donne également peu de sensations manette en main. On remarque qu’il n’y a en revanche aucune trace de monster ou trophy trucks et autres joyeusetés du genre, comme les caddies de golf présents jadis. Pour un jeu arborant comme slogan “All vehicules” c’est un peu moyen, peut-être que les DLC (payants) viendront étoffer le catalogue par la suite.
Drapeau rouge
La personnalisation, quant à elle, est toujours présente, on retrouve donc un vaste choix de pièces cosmétiques et mécaniques (améliorant les performances en jeu) pour équiper et upgrader nos machines. Le pilote n’est pas en reste avec également toute une sélection de casques, tenues, bottes et gants sous licence. On note néanmoins quelques absents comme les protections de cervicales et également l’impossibilité, à l’image des jeux Milestone beaucoup plus complets sur ce point, de modifier les polices d’écritures ou la taille des numéros. Comme c’est le cas depuis l’épisode “Alive”, ce nouveau MX vs. ATV est au format économique “évolutif”, c’est à dire que les véhicules sous licence (notamment les marques de motos), sont vendus séparément en DLC. Si cette pratique pouvait s’avérer bénéfique avec un jeu vendu 30€ comme ce fut le cas de MX vs. ATV Supercross, ici le choix est assez discutable compte tenu du prix de vente de 50€. Surtout qu’entre temps Monster Energy Supercross est passé par là avec l’intégralité des pistes, motos, pilotes et équipes officiels sous licence… Alors oui, il faut de nouveau débourser 2€99 (par moto) pour acquérir la même machine en jeu que celle que vous avez dans votre garage et non, tous les véhicules achetés dans le précédent jeu ne sont pas disponibles dans celui-ci…
Enfin, et on ne peut s’empêcher d’en parler, le jeu souffre d’un gros manque de finition. Les bugs sont omniprésents, qu’ils soient de physique, de collision, de son ou de chargement, on se demande comment un tel jeu peut sortir en l’état en 2018. La traduction (souvent risible) est incomplète avec certaines parties totalement en anglais et l’ergonomie des menus est assez mauvaise. Quand on ajoute à ça les gros soucis de frame rate évoqués plus haut, on peine à trouver des excuses au jeu ou des arguments pour le défendre...